Retour de mission en RDC pour nos 4 collaboratrices

07 avril 2023

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Retour avec Camille Bottin (chargée de communication), Christine Billen (psychologue à la Résidence CHC Membach), Isabelle François (program manager à la direction médicale) et Sylvie Knuts (infirmière à la Clinique CHC Hermalle) sur cette expérience en République démocratique du Congo (RDC).
 

Retour de mission en RDC pour nos 4 collaboratrices

Le 5 février 2023, nous avons pris le départ pour ce qui devait être la 6e mission d’observation à Pawa, notre zone de santé partenaire en RDC dans le cadre de l'initiative "Hôpital pour Hôpital" de l'ONG Memisa. Malheureusement, pour une question de sécurité, nous n’avons pas pu prendre le vol qui devait nous emmener dans le nord-est du pays. Après un temps de déception, nous nous sommes remotivées. Memisa a rapidement organisé un autre voyage d’immersion dans une province qu’elle soutient aussi: le Kongo central.

Familiarisation avec le système de santé
Les premiers jours du voyage, nous les avons passés à Kinshasa, capitale de la RDC. Une ville immense (600 km2) de plus de 15 millions d’habitants. La suite, c’est au sud-ouest de Kinshasa qu’elle s’est déroulée, dans la brousse du Kongo central, une vaste région (plus de 2 fois la taille de la Belgique) de relief, de chutes d’eau et de cultures variées.

Durant 15 jours, nous avons parcouru plusieurs centaines de kilomètres, visité une série d’hôpitaux et centres de santé, assisté à une formation sur les soins palliatifs, des briefings sur la sécurité et les soins et rencontré de très nombreux intervenants: infirmièr(e)s, médecins, consuls belges et congolais, religieuses, étudiants, patients... Un moyen de nous familiariser avec le système congolais et de mieux le comprendre, en favorisant une approche terre à terre.

Dortoir composé de près de 10 lits lors de la visite de l'hôpital de Kisantu, en RDC.

Le système de santé en RDC
Le pays est divisé en provinces, chacune divisée en zones de santé. Dans chaque zone de santé se trouvent un hôpital général de référence (ou HGR), des hôpitaux secondaires et des centres de santé. Les centres de santé sont le premier point de contact avec la communauté. Les patients doivent d’abord s’y présenter avant d’être référés vers un hôpital, si nécessaire. C’est là, par exemple, que les accouchements par voie basse et sans complication ont lieu. En cas de complications et/ou de césarienne, les parturientes sont dirigées vers les hôpitaux.

Focus sur Ngidinga (Kongo central)
C’est en nous rendant à Ngidinga que nous nous sommes rendu compte de l’état catastrophique des routes en RDC. Sans voiture adaptée, il est très difficile de se déplacer et donc d’être soigné. Les seuls moyens de locomotion dont la population dispose sont les motos et... la marche à pied. Très peu possèdent une voiture et les transports en commun sont quasi inexistants.

Après une étape à Kisantu, et la visite de plusieurs hôpitaux et centres de santé sur notre route, c’est au couvent des religieuses de la congrégation Notre-Dame de Namur à Ngidinga que nous avons été accueillies pour 3 jours. Quel bonheur d’enfin goûter à ce qui était le but de notre voyage: l’immersion, seul véritable moyen d’apprendre à connaitre la communauté locale. Cela nous a permis, chacune de notre côté, de suivre le personnel de l’hôpital et les patients, selon nos affinités.

Photo de groupe rassemblant les soeurs de Ngidinga et les collaboratrices du Groupe santé CHC en mission en RDC

Sylvie a suivi Christian, un infirmier qui travaille en chirurgie.
Nous commençons pourtant la journée par la pédiatrie. 1er constat: les infirmiers sont polyvalents. Ensuite, nous allons voir les patients de chirurgie dont un jeune garçon avec une fracture du coude et du tibia à la suite d’un accident de moto, cas très fréquent, me précise Christian. Puis, je rencontre cette demoiselle d’environ 12 ans, mordue par un serpent au niveau du poignet. Son regard me touche, on y ressent de la souffrance. 2e constat: le manque de médicaments et dans ce cas précis, les antidouleurs, utilisés «quand c’est vraiment indispensable». Son état m’inquiète et Christian m’explique qu’elle devrait être transférée vers l’hôpital de Kisantu pour une prise en charge adaptée et éviter l’amputation. Malheureusement, les parents n’ont pas l’argent nécessaire. 3e constat : par manque d’argent, certains patients n’ont pas une prise en charge optimale. Pour cette petite princesse, l’histoire se termine heureusement bien... Elle a finalement pu être transférée à l’hôpital voisin et, aux dernières nouvelles, a évité l’amputation.

Christine a eu le plaisir d’échanger avec les équipes soignantes sur leur approche soucieuse du bien-être des patients.
Les psychologues sont souvent demandées mais peu représentées, faute de budget. Elles ont donc profité de ma présence pour me solliciter sur des sujets tels que l’anamnèse d’accueil, l’analyse de la demande, la démence (sachant que la population associe souvent ces symptômes à de l’envoûtement et que la personne âgée peut alors se retrouver délaissée, voire rejetée), la cohabitation difficile en post-partum entre les mamans avec bébé et les mamans en deuil, et enfin de leur besoin de collaborer et former les tradipraticiens pour limiter les abandons de soins en faveur de pratiques locales ayant parfois des aboutissements funestes.

Isabelle s’est entretenue avec Sœur Suzanne, la gestionnaire de l’hôpital.
Sœur Suzanne est ce qu’on appellerait au Groupe santé CHC un directeur «multi-casquettes». Et on peut dire qu’elle assure! Sans formation en gestion à la base, elle est responsable aussi bien des approvisionnements en médicaments qu’en
carburant (pour le groupe électrogène), assume la gestion des ressources humaines et veille à l’équilibre des finances. Elle est d’ailleurs réputée, au sein de la zone de santé dont fait partie l’hôpital de Ngidinga, pour sa bonne gestion. Même si nos mondes sont quand même fort éloignés, ils présentent malgré tout des similitudes en termes de méthodes de suivi de l’activité et de la qualité: les gestionnaires congolais gardent à l’œil, comme nous, une série d’indicateurs comme la durée moyenne de séjour ou les taux d’infections post-opératoires. Il est par contre plus compliqué, voire gênant, de comparer les moyens disponibles pour gérer un hôpital au Congo et en Belgique, ou encore les niveaux de salaire !

Pendant ce séjour, nous avons vécu des expériences très fortes en commençant par notre rencontre avec les religieuses, le personnel de l’hôpital, les patients et leur famille présente auprès d’eux, ensuite lors l’accueil de la communauté, puis à l’occasion de notre visite à l’école située à côté du couvent. Nous avons été submergées de sourires, de bienveillance et de gratitude. Admiratives face à leur bravoure. Surprises de l’enthousiasme et de la curiosité des enfants en nous voyant. C’est la gorge nouée que nous leur avons dit au revoir en promettant de nous donner des nouvelles et qui sait, peut-être leur apporter à eux aussi un certain soutien...

Nous n’aurons donc pas eu l’opportunité de constater la situation à Pawa, mais nous aurons tout de même eu la chance d’être témoins du courage et de la résilience de la population congolaise. Les médecins et infirmièr(e)s font un travail remarquable avec les moyens dont ils disposent, mais ne peuvent malheureusement pas toujours soigner, faute de matériel, de médicaments, d’électricité... Les patients ne peuvent pas toujours être traités faute d’argent, de transport, d’accessibilité... Heureusement, les conditions s’améliorent et le soutien de Memisa est clairement visible. Comme l’a si bien dit un ancien collaborateur parti sur le terrain en 2011: Pour chaque enfant qui meurt, il y en a aussi un qui est sauvé grâce à notre énergie et notre engagement pour le projet "Hôpital pour Hôpital". Le projet a donc bien tout son sens et mérite que nous continuions à le soutenir !
 
Camille, Christine, Isabelle et Sylvie

Pour plus de photos et de détails sur le voyage, rendez-vous sur www.polarsteps.com/CHCpawa