Mon parcours pour fonder une famille

A l’époque, avec mon mari, nous sommes ensemble depuis 6 ans. Mariés, heureux et profitant bien de la vie, nous souhaitons à présent agrandir notre famille. La maison est en construction et l’arrivée de notre neveu nous donne envie de vivre cette belle aventure.

J’arrête donc cette pilule que je prends depuis de trop longues années et je me mets en tête que ça va fonctionner du premier coup (comme toutes mes amies autour de moi d’ailleurs). Evidemment, avec l’arrêt de la pilule, j’ai tous les symptômes (nausées, ballonnements, douleur aux seins, .…) et donc j’y crois. Mon cycle n’étant pas très régulier à la base, je me convaincs que 28 jours plus tard, si je ne suis pas réglée, c’est que je suis enceinte. Je fais donc un premier test, puis un deuxième quelques jours plus tard. A 35 jours, avec l’arrivée des règles, je me résous à admettre que j’ai été un peu trop enthousiaste. Les mois passent, et à chaque fois c’est la déception (cycles irréguliers donnant de faux espoirs). Autour de moi, beaucoup d’amies ou de connaissances tombent enceinte après quelques mois d’essai. Nous, ça ne marche pas. On commence à me questionner et à me poser LA question: "Alors, c’est pour quand les enfants?" ou "Vous avez le mode d’emploi?". Durant ce temps, on se concentre sur notre maison et on y travaille dur pour penser à autre chose, en nous disant que notre tour viendra.

Ma gynécologue de l’époque m’avait dit qu’il fallait attendre un an avant de faire des tests. Après 11 mois, nous retournons la voir pour analyser la situation et faire un premier test sur mon mari, car selon elle, c’est souvent de la faute des hommes (le pauvre, quelle pression !).

Les tests s’enchainent et ils s’avèrent que nous avons un problème tous les deux (c’est déjà bien pour la culpabilité). Cela fait maintenant plus d’un an que nous essayons et je prends mes renseignements ailleurs. Je découvre alors le service PMA du CHC (à Rocourt à l'époque), ce nouveau monde que je ne connais pas et qui va rythmer notre vie durant de longs mois. Des tests sont à nouveau effectués, des prises de sang répétitives sont réalisées et notre gynécologue PMA nous indique que nous avons besoin d’une FIV (fécondation in vitro) pour y arriver. On nous conseille d’aller à la séance d’information. Là-bas, on se rend compte qu’il y a beaucoup de couples dans la même situation, comme dans la salle d’attente du service à chaque fois que nous nous y rendons d’ailleurs. Durant la séance, les infos s’accumulent, tout comme les termes techniques, rendus le plus possible accessibles pour nous, les aides médicales et psychologiques (ha bon, c’est si dur que ça?). On ressort de là avec l’impression que ce ne sera pas si simple. Mais au moins, on avance, on va y arriver, c’est un système qui roule, ça se ressent! Je garde cette foi dans la vie qui dit que tout s’arrangera et que nous y arriverons.

Le traitement FIV commence et à chaque étape, c’est l’inconnu. Je suis enthousiaste, même les piqûres me donnent l’impression d’atteindre mon but. Je demande à mon mari de tout retenir avec moi, je prends des notes car j’ai peur d’oublier quelque chose… Mon mari me fait les piqûres et nous vivons cela ensemble. Dans ce couloir de la PMA, je croise des femmes, des couples qui sont dans le même état d’incertitude que nous, parfois avec le sourire ou des larmes (selon leurs derniers résultats). Après toutes ces piqûres d’hormones (qui chamboulent tout dans notre esprit) et tous ces rendez-vous (prises de sang régulièrement le matin, avant le travail, avec les sages-femmes ou rendez-vous avec la gynécologue pour voir l’évolution des ovocytes), ça y est, c’est le grand jour, la ponction! Je rentre en hôpital de jour où je suis extrêmement touchée par la gentillesse des infirmières. On vient me chercher et on m’indique que mon mari fera "sa part" en même temps. Même pas peur, pas besoin d’anesthésie (sauf une petite locale je pense). Quelle erreur! Je pense que je n’ai jamais eu aussi mal de ma vie! Je pleure! Pourquoi devoir passer par cette douleur, ces étapes pour créer la vie alors qu’on a toujours dit que c’était naturel? Je reviens dans la chambre et je me repose en attendant les résultats. L’après-midi, on m’indique qu’on a ponctionné 8 ovocytes (waow, ça fait beaucoup d’enfants!). Au fur et à mesure des coups de fil, on m’indique au final qu’il en reste 3. On m’en implantera un 5 jours plus tard. Les 2 autres sont congelés.

Après être passée tous les 2 jours à l’hôpital, rythmée par les piqûres, les traitements, c’est maintenant le silence radio. Il faut attendre 10 jours avant la prise de sang de verdict. C’est long et stressant! Ne pas y penser, c’est impossible! Donc j’attends mais j’y crois !

Le jour de la prise de sang, j’ai perdu un peu de sang, on me dit que ce n’est peut-être rien et que je dois quand même la faire. On me téléphone en me disant que c’est positif, que je suis enceinte mais que je dois y retourner 4 jours plus tard. Que dois-je penser? Je suis enceinte, que peut-il arriver? Le taux augmente, faiblement, mais il augmente, 2 prises de sang suivront et une échographie où on ne voit rien. On me parle alors d’une grossesse extra-utérine. Je n’y crois pas, je pense qu’elle n’a pas du bien regarder (on ne sait jamais). Les prises de sang et échos continuent et confirment le diagnostic. Un mois après la ponction, je me retrouve dans le couloir de la PMA mais cette fois-ci ma démarche n’est pas d’y arriver, mais d’enlever l’embryon qui se développe toujours en moi. C’est ce qui a été le plus dur pour moi. Faire partir cet espoir, ce début de vie qui grandissait en mois.

Comme cette injection est dangereuse pour une future grossesse, je dois attendre 6 mois pour reprendre les traitements. Les amies autour de moi continuent à tomber enceinte (à un moment, j’en avais 12 autour de moi). Le temps est tellement long! Je me sens tellement seule et incomprise à vivre ce parcours même si je vois bien qu’une grande partie de mon entourage veut me soutenir. J’ai des marques de soutien qui me réchauffent le cœur, parfois des paroles maladroites qui font mal mais partant toujours d’un bon sentiment. La gynécologue me dit qu’on a la preuve que ça fonctionne, que je peux tomber enceinte. L’enthousiasme s’essouffle néanmoins.

Dès que je peux recommencer, j’enchaine les essais, on implante les 2 embryons restants (un à la fois) sans succès. Ensuite, 2ème et 3ème ponction (2 sur 6 obtenus la première fois et 3 la troisième fois). Je ne vis plus que pour ça. Je ne me résigne pas, j’y arriverai. Il me faut à chaque fois plus de temps pour me remettre des résultats négatifs.

Un jour, mon corps et ma tête n’en peuvent plus, je suis épuisée des résultats négatifs et des traitements à répétition! Je veux faire une pause, pour ma santé physique et mentale. Je ne vivais plus que pour cela en m’acharnant et en m’arrêtant de vivre à chaque attente (quand il ne faut plus y penser il paraît). Les hormones et les traitements ont trop dirigé ma vie!

A un moment, on se résigne, jamais nous n’arriverons à avoir des enfants! Mon mari me parle d’adoption (sujet que nous avions abordé avant notre mariage et que j’avais accepté étant donné que "ça n’arrive qu’aux autres"). Mes rêves s’effondrent, ne pourrais-je donc jamais porter la vie? Avoir un bout de nous? Il nous reste 3 ponctions possibles (quota de la mutuelle). Je veux être sûre d’avoir tout essayé!

En route pour 4ème ponction avec tout ce qui l’accompagne: hospitalisation, douleurs, piqûres, prises de sang quotidiennes (comme on n’a droit qu’à 6 essais, l’étau se resserre). On est enfin prêt à essayer 2 embryons en même temps et à accueillir des jumeaux dans notre foyer (ce qui me faisait très peur au début). L’espoir renait, la pause a fait du bien et je me dis que sur les 2, il y en a bien un qui va prendre. Cette fois-ci, 11 embryons sont obtenus, 2 sont transférés et 6 sont congelés (l’espoir continue à grandir et la façon de penser change aussi: si ça ne marche pas, on réessayera comme d’habitude. Je finis par rentrer dans cette routine).

J’ai très mal au ventre, je suis vraiment gonflée et j’arrive à peine à marcher car je fais une hyperstimulation! Je dois être au repos. Du coup, pas facile de penser à d’autres choses. Comme si j’avais besoin de vivre cela en plus!

12 jours après, prise de sang le matin et coup de téléphone quelques heures après. Ca y est, je suis ENCEINTE (avec un beau taux)! Je n’ose pas y croire, c’est trop beau pour être vrai, je reste prudente! Il y a 3 mois dangereux devant moi, des menaces de grossesse extra-utérine ou de fausse couche. Mais la vie est en moi.

Une page se tourne, après les quelques rendez-vous de contrôle à la PMA, ma grossesse est NORMALE (à part l’hyperstimulation bien sûr, mais j’accepte la situation tant que bébé est bien là).

A deux mois de grossesse, une nuit, je perds beaucoup de sang, trop de sang! Pour moi, il n’y a qu’une explication, j’ai perdu ce petit être qui grandissait en moi. Je suis perdue en arrivant à l’hôpital jusqu’au soulagement d’entendre battre son petit cœur. Il s’agit d’un décollement placentaire. Je suis alitée 2 mois et demi mais c’est pour la bonne cause! J’ai décidé qu’on allait se battre ensemble avec mon bébé pour aller jusqu’au bout et pour qu’il puisse être un jour dans nos bras. C’est ce qui est arrivé quelques mois plus tard (à terme). Quelle chance de pouvoir le serrer dans mes bras, de pouvoir le regarder, le sentir, le chouchouter. On s’est battu et on a réussi! On a donné le maximum de nous-mêmes et notre famille est comblée.

Ce que je retiens de cette expérience et de ces 3 années d’acharnement, c’est surtout le soutien de mon mari qui m’a consolée, qui a assuré et assumé chaque instant, le soutien de beaucoup de personnes qui m’entourent (surtout mes supers collègues et mes parents), le personnel de la PMA (infirmières, gynécologues, .…) qui mettent tout en place pour que la magie s’opère dans les meilleures conditions possibles, l’évolution dans la vie et le regard sur les autres qui sont parfois maladroits mais toujours bienveillants. J’ai eu la chance de recevoir beaucoup d’amour et je leur en serai toujours reconnaissante. Malgré cela, je me sentais très seule de vivre cela (personne autour de moi n’avait vécu cela et ne comprenait réellement) et un sentiment d’injustice a prédominé tout au long de mon parcours.

J’essaie donc d’accompagner au mieux ou de soutenir les personnes qui m’entourent et qui vivent cela. Je ne veux pas qu’ils vivent cette solitude. Même si vous n’avez jamais été concerné, je vous assure que l’écoute, l’amour, l’intérêt et le soutien (sans donner des conseils, surtout si vous n’êtes pas passé par là!) fait énormément de bien. Je témoigne pour cela, pour que vous puissiez comprendre et soulager vos amis ou les membres de votre famille qui passent par là. C’est ce soutien qui aide à passer les étapes et à tenir bon, à se battre jusqu’au bout et à mieux le vivre.

6 mois après la naissance de Julien, nous avons pensé que nous pourrions essayer naturellement d’avoir un deuxième enfant (et oui, nous sommes bornés) et quand notre garçon a eu 1 an, nous avons repris les démarches. Comme il nous restait des embryons congelés, nous n’avions pas besoin de repasser par une ponction (c’est déjà ça). Nous en avons implanté 1 qui a pris de suite. A l’heure d’écrire ce témoignage, je suis enceinte de 9 mois et nous nous préparons à accueillir, d’un instant à l’autre, notre petite fille, notre deuxième merveille.

Alors, même si ce fut difficile, MERCIIIIIIII à la vie et à la médecine qui fait que tout est possible!
Et merciiiii à ceux qui ont été là pour moi! Je vous aime et je n’oublierai jamais ce que vous avez fait pour moi!

Véronique